Pour occuper le site Guertin, il faut dorénavant un permis !
Mélissa Gélinas
Quelques conseillers municipaux, coordonnateurs et une avocate ont tenu à exprimer leur désaccord concernant la nouvelle réglementation qui vise à encadrer les personnes itinérantes sur le site Guertin, lors de la séance du conseil municipal du 8 juillet dernier. Malgré certaines oppositions, le règlement a finalement été adopté par la majorité, soit par 15 conseillers municipaux.
Ce nouveau projet de règlement permettra, plus précisément, d’encadrer l’occupation du site par des codes de vie à respecter, notamment au niveau de la salubrité et des services d’incendie. Pour ce faire, un permis temporaire gratuit sera requis pour occuper un espace de 20,25 mètres carrés pour une période de six mois avec possibilité de renouvellement.
Mario Aubé, conseiller municipal du district de Masson-Angers, comprend la volonté de vouloir réglementer les lieux, mais, selon lui, le fait d’adopter un règlement pour autoriser son occupation n’envoie pas le bon message. « Nous venons restreindre des humains dans un « 10 par 10 » en disant publiquement qu’à Gatineau, il y a un camping en milieu urbain gratuit […] prenez votre permis, nous allons vous donner un espace carré, piquez votre tente et vous allez être correct pour six mois », exprime-t-il. « Ceux qui ne voudront pas suivre les règles vont finir par quitter et s’en aller ailleurs ».
Cette réglementation vient, d’après lui, cibler les citoyens vulnérables qui souhaitent simplement se trouver un espace pour vivre. « Ce dont nous avons besoin, c’est du réel soutien communautaire pour intervenir auprès de ces gens-là », explique-t-il. « Ce n’est pas à la Ville de jouer ce rôle-là ».
Considérant l’article 16 qui interdit les bonbonnes de propane et l’article 17 qui empêche l’utilisation de moyens de chauffage, la situation risque d’être plus difficile dès l’arrivée de l’hiver. « Cela va compromettre la sécurité lors de froid extrême », souligne Vanessa L. Constantineau, coordonnatrice de l’Association pour la défense des droits sociaux de l’Outaouais. Il s’agit, selon elle, d’un projet qui va à l’encontre du droit à la vie.
D’un autre côté, pour Alexandre Gallant, coordonnateur au collectif régional de lutte de l’itinérance en Outaouais (CRIO), cette règle constitue une atteinte à la vie privée et à la dignité de la personne. « Il n’y aurait pas aucun citoyen qui accepterait qu’un agent de la Ville entre chez lui pour vérifier si la vaisselle a été faite », commente-t-il.
Par ailleurs, M. Gallant précise que ce nouveau règlement a été appliqué sans directives. « La Ville de Gatineau travaille sur un guide de gestion du campement […] qui est censé venir expliquer le moyen d’appliquer les interventions, mais, malheureusement, il n’est pas encore prêt », dit-il.
Notamment, selon Anne Thibeault, avocate à la Clinique interdisciplinaire en droit social de l’Outaouais, il ne s’agit pas d’une réglementation qui a été présentée dans sa globalité. « Bien qu’il y ait un comité qui a regardé l’application de celle-ci, ils n’ont eu aucun mot à dire […] », exprime-t-elle. « Il ne s’agit pas d’une consultation démocratique en bonne et due forme […] », ajoute-t-elle.